Grenelles des violences masculines (quatre communiqués)

Grenelle des violences masculines :
Le Gouvernement passe à coté de l’urgence de la situation

Samedi 23 Novembre 2019, 150 000 personnes dans la France entière sont descendues dans les rues pour dénoncer les violences masculines contre les filles et les femmes. Cette mobilisation féministe historique témoigne d’une prise de conscience et d’un recul de la tolérance de la société envers ces violences. 

1% des violeurs condamnés, 0,4% des pédocriminels… L’impunité des agresseurs en France reste aujourd’hui quasiment totale. En matière de féminicides, le rapport de l’Inspection générale de la Justice relatif aux féminicides, rendu public le 17 Novembre dernier par la Ministre de la Justice Nicole Belloubet, énonce que dans 65% des cas les services de police avaient déjà connaissance de faits de violences conjugales subis par la victime. Dans le même temps 80% des plaintes pour violences conjugales sont classées sans suite…

Osez Le Féminisme ! dénonce les dysfonctionnements dans le système pénal, les politiques publiques insuffisantes et un manque criant de budget pour répondre aux exigences et à l’urgence de la lutte contre les violences masculines contre les filles et les femmes. 

Le Lundi 25 Novembre, le Premier Ministre Edouard Philippe a annoncé les conclusions du Grenelle des violences conjugales qui a démarré le 3 Septembre dernier. Il semblerait que le Gouvernement n’ait pas mesuré l’ampleur de la tâche. Les mesures proposées sont encore loin d’être à la hauteur de l’urgence que vivent les victimes :

Des mesures déjà existantes mais pas appliquées : La formation des enseignant.e.s sur la question des violences sexistes est prévue dans la loi depuis 2010. L’interdiction pour le juge de proposer une médiation entre un conjoint violent et sa victime est obligatoire depuis la ratification par la France de la Convention d’Istanbul en 2014. Même la grille d’évaluation mise à disposition des commissariats et censée aider les forces de polices à prendre en charge les victimes correctement n’est pas une nouveauté… 3 mois de Grenelle pour des mesures déjà existantes, déjà insuffisamment ou pas du tout appliquées !

Des mesures « fortes » sans budget ; 1000 places en centre d’hébergement d’urgence pour femmes victimes de violences, 81 postes d’intervenant.e.s sociales et sociaux créés dans les commissariats, ouverture de la ligne du 3919 24h/24 7j/7, formation des professionnels de police, création de 2 centres d’accueil par région pour les hommes violents… Comment ces mesures vont-elles être appliquées alors que le budget consacré à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles restera le même en 2020 qu’en 2019 ? En effet, le budget du Secrétariat d’Etat à l’Egalité femmes-hommes reste stable à 29 millions d’euros. Aucune augmentation réelle du budget alloué à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles n’est à constater.

Des confusions dangereuses ; les hommes violents ne le sont pas à cause de l’alcool mais à cause d’une culture sexiste qui consacre l’impunité des agresseurs !

Osez Le Féminisme ! réclame une loi cadre, des mesures associées à un véritable budget pour pouvoir être concrètement mises en oeuvre et une lecture résolument féministe des violences masculines contre les filles et les femmes. La mobilisation du 23 Novembre nous a montré que, progressivement, le sexisme recule dans la société. Aux politiques publiques de réagir !

https://mailchi.mp/osezlefeminisme/texte-1782285?e=443e3576fe


Communiqué du Collectif National pour les Droits des Femmes sur les mesures annoncées par le Premier Ministre (25/11/2019) 

Édouard Philippe, entouré de plusieurs membres du gouvernement, a présenté ce matin les décisions issues du #GrenelleViolencesConjugales.

Peut-on dire, une fois de plus, que la montagne a accouché d’une toute petite souris ? En tous cas, les mesures obtenues sont le résultat du rapport de forces construit par les féministes depuis des années et qui s’est concrétisé superbement dans la rue le 23 novembre dernier.

Parmi les mesures annoncées, certaines sont déjà dans la loi et trop peu  appliquées, ou dans la Convention d’Istanbul que la France a signé en 2011 et ratifiée en 2014 :

  • Formation des enseignants : déjà annoncé lors de la suppression des ABCD de l’Égalité par Benoît Hamon en 2014 et dans la loi du 4 août 2014.

  • Ouverture du 39 19 24/24 et 7/7 : déjà obligatoire dans la Convention d’Istanbul.

  • 1.000 places d’hébergement supplémentaires : c’est insuffisant, nous demandons, comme le préconise le Grevio (article 154), l’ouverture d’un centre spécialisé pour 10 000 habitant.e.s, compte-tenu des 230 000 femmes victimes de violences conjugales par an en France.

  • 81 places supplémentaires d’intervenant.e.s sociales et sociaux dans les brigades et commissariats : nous demandons depuis 2006 une force de police spécialisée comme en Espagne (qui a réduit de moitié les féminicides commis).

  • Possibilité de dérogation au secret médical pour signaler des violences : celle ci existe déjà. Les médecins y sont autorisé.es pour prévenir passages à l’acte ou mise en danger de la vie d’autrui.

  • Suppression de la médiation en cas de violences : la médiation doit être proscrite, qu’il s’agisse de médiations pénales ou familiales,

  • Ouverture de « chambres d’urgence » pour juger les affaires de violences : nous demandons de véritables tribunaux spécialisés avec des juges formés ayant des compétences pénales et civiles, supprimant ainsi l’absence de communication entre les juridictions.

  • Prise en charge des agresseurs avec un appel à projet public ET privé dans 2 centres : cette prise en charge doit rester l’apanage du domaine public et s’appuyer sur des principes dénonçant la domination masculine comme l’a constaté le Grevio, groupe de contrôle de l’application de la Convention d’Istanbul.

  • Suppression/suspension de l’autorité parentale des auteurs de féminicides : déjà existantes dans les textes, mais  pour ainsi dire jamais prononcées.

Les seules mesures vraiment nouvelles que nous saluons sont :

  • la création de la circonstance aggravante de suicide forcé

  • la suppression de l’obligation alimentaire de la part des descendants sur les ascendants.

Et grosse cerise sur ce tout petit gâteau : rien n’est financé, Édouard Philippe affirme que les 360 millions mis sur la table sont suffisants… Nous demandons un milliard contre les violences, pour ce qui avait été annoncé comme la grande cause du quinquennat d’Emmanuel Macron!  Une politique non financée est une politique non appliquée.

Ce gouvernement n’a rien compris à la colère qui monte dans le pays contre ces violences masculines qui pourraient être combattues par une loi-cadre, réclamée depuis plus de 13 ans par les féministes.


Communiqué de presse des effronté-es 25 novembre 2019

Tout ça pour ça !

Ce matin Édouard Philippe a donné les conclusions du Grenelle contre les violences conjugales : alors que les associations ont permis ces derniers mois de faire reconnaître l’ampleur des violences sexistes et sexuelles et alors que Nous toutes a réuni 150 000 personnes dans la rue samedi dernier, les mesures annoncées sont risibles et relèvent presque du mépris pour deux raisons principales. Premièrement, le gouvernement dit avoir entendu les victimes et parle d’un changement dans la prise en charge des violences, mais annonce peu ou prou le même budget que celui accordé jusqu’alors ; cette prise en charge sera donc nécessairement insuffisante comme elle l’est aujourd’hui. Deuxièmement, en annonçant des mesures déjà existantes depuis plusieurs années et qui restent inappliquées, faute de moyens.

Comment peut-on décemment et sérieusement prétendre appliquer des politiques volontaristes et efficaces sans réels moyens financiers ? « Il n’y a pas d’argent magique » avait déclaré Marlène Schiappa. « Je ne me place pas sur ce terrain » avait dit Édouard Philippe. Pourtant deux jours après le début du grenelle, la tech française s’est vue gratifiée d’une annonce présidentielle de 5 milliards d’euros ! Pourtant le service universel bénéficiera d’un financement de 1,5 milliard ! Pourtant le budget des campagnes pour la sécurité routière s’élève à 12 millions par an, contre 2 millions pour les campagnes de prévention contre les violences sexistes et sexuelles, soit 6 fois moins.

Concernant les mesures adoptées, elles sont parfois déjà existantes comme l’interdiction de mettre en place des médiations entre conjoints lorsqu’il y a eu des violences, la levée du secret médical en cas de danger de mort ou encore la formation des professionnel-les de l’Éducation Nationale à la prévention des violences, prévue depuis 2010. Quant à la formation initiale et continue obligatoire de tou-tes les professionnel-les qui accueillent les victimes, dans la police, la santé, la justice, le travail social, les universités et le milieu scolaire, que nous appelions de nos vœux et qui est restée absente de toutes les déclarations gouvernementales tout le temps du grenelle, elle est aujourd’hui reprise plus que timidement dans la conclusion de ce dernier : 130 heures soit 5 jours et demi seulement de formation seront dispensées, uniquement aux gendarmes. On peut encore se demander avec quels moyens, en se basant sur le fameux document de politique transversale 2020 qui annonçait sur la police et la gendarmerie un faux budget correspondant en réalité à des mesures et programmes déjà existant-es et mis-es en place depuis plusieurs années.

L’annonce du budget 2020 n’est autre qu’une entourloupe faite de montages grossiers, de calculs farfelus, d’intégration de dépenses déjà existantes – voire de mensonges, comme le fait de comptabiliser sur 2020 des dépenses prévues sur trois ans, pour aboutir au final à 1,1 milliard et contrer ainsi les associations féministes sur cette exigence que nous martelons depuis des mois, prétendant ainsi y répondre (le document de politique transversale est sorti le 16 octobre, aussitôt débunké par Nous Toutes)…

Il en va de même pour la création de places d’hébergements annoncée par Marlène Schiappa avant l’été, qui n’avaient toujours pas été créées en septembre et ce malgré son assurance qu’elles verraient le jour en juillet-août.

Ainsi va la politique en matière de lutte contre les violences faites aux femmes depuis des décennies : effet d’annonce, empilement de mesures législatives, sans aucun moyen supplémentaire et donc sans résultat, restant inappliquées. Les groupes de travail du grenelle n’ont-ils pas reçu la ferme consigne de faire des propositions à budget constant ? En réalité, une augmentation d’à peine 5% est prévue en 2020 contre les violences envers les femmes, bien loin du milliard d’euros préconisé par le HCE et quatre autres institutions et ONG dans le rapport « où est l’argent contre les violences faites aux femmes ? ».

Certaines mesures tombent sous le sens comme le retrait du port d’arme chez un conjoint violent, ou la suspension de l’autorité parentale chez un père meurtrier. Il est bien étonnant qu’il ait fallu un grenelle long de trois mois pour en arriver à ces évidences.

Concernant l’éducation, aucune mesure : pour Jean-Michel Blanquer, la question des violences ne concerne pas l’éducation. C’est pourtant l’une des propositions clé des féministes : prévenir les comportements violents et machistes par des programmes scolaires ambitieux (et donc demandant des moyens), apprenant aux enfants le respect de l’autre, la non-violence, le consentement, l’assimilation de comportements non-sexistes.

Pour finir, le gouvernement continue sa stratégie consistant à encourager les femmes à porter plainte, alors que de nombreuses victimes avaient tout fait pour s’en sortir : divorce, main courantes, plaintes, mais la société n’a pas été en mesure d’organiser leur protection à l’issue de leur entreprise si courageuse. Le dernier rapport de l’Inspection Générale de la Justice est accablant sur ce point et sur bien d’autres.

Les effronté-es rejoignent l’indignation de Nous Toutes et ne cesseront pas la lutte pour les droits les plus élémentaires des femmes et pour leur sécurité, elles qui tombent tous les deux jours, sont violées toutes les 7 minutes, sont battues, agressées et harcelées, laissées pour compte d’une société dont les gouvernants se payent de mots.

https://effrontees.wordpress.com/2019/11/25/12484/


Grenelle : une déception aussi immense que les attentes.

Le Premier ministre a clôturé ce lundi matin le grenelle contre les violences.

Deux jours après une mobilisation historique en France contre les violences sexuelles, il n’a pas eu un mot pour les dizaines de milliers de manifestant.e.s qui sont descendu.e.s dans la rue partout en France samedi à l’appel de #NousToutes.

Dans son discours, le Premier ministre pose les constats et emploie des mots durs : il parle de « dysfonctionnements majeurs » et de « faillite collective ». Il n’en tire pas les conclusions.

La déception est à la hauteur de l’immense attente soulevée ces derniers mois.

De nombreuses mesures annoncées existent déjà. Concernant la médiation familiale, la France a ratifié un texte qui interdit la médiation en cas de violences au sein du couple. La formation des professionnel.le.s de l’éducation à la prévention des violences est prévue dans la loi depuis 2010. La levée du secret médical existe déjà en cas de danger de mort.

On attendait des mesures de prévention à l’école, des mesures de formations, des places d’hébergement dédiées et financées. On attendait des moyens financiers qui marquent un changement d’échelle. De ce côté, c’est zéro pointé.

La principale information à retenir, c’est que le premier ministre a annoncé que la France allait mobiliser 360 millions contre les violences l’an prochain. C’est quasiment la même somme qu’en 2019. (Retrouvez l’analyse de ces 361,5 millions d’euros :

https://blogs.mediapart.fr/carolinedehaas/blog/181019/361-millions-deuros-supplementaires-contre-les-violences-non-pas-vraiment)

Le gouvernement ne change pas les politiques publiques dédiées à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Les chiffres des violences ne baisseront pas.

Nous sommes déçues. Nous sommes également déterminées. Si le gouvernement ne veut pas changer de cap, nous le ferons à sa place.

Nous irons dans chaque entreprise, chaque administration, chaque université, chaque quartier, chaque coin de rue. Nous interviendrons dans chacun de nos repas de famille et chaque échange à la machine à café.

Nous ne lâcherons rien. Aucun commissariat, aucun palais de justice, aucun article de presse. A chaque fois que vous banaliserez les violences, que vous blâmerez les victimes, que vous mettrez en doute la réalité de ce que nous vivons, à chaque fois, vous nous trouverez sur votre chemin.

Nous allons, pas à pas, faire monter le niveau de conscience de ce pays et le transformer. Nous allons, pas à pas, faire cesser les violences autour de nous. Puis autour de nos ami.e.s. Puis autour des ami.e.s de nos ami.e.s. Et ainsi de suite.

Nous sommes #NousToutes. Nous sommes un mouvement que rien ne pourra arrêter.

Contact presse : Pauline Baron – 06 84 80 00 52 – noustoutes2411@gmail.com

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